Que l'observation astrophysique serait facile si l'image d'un point était un point ! Dans le meilleur des cas, l'image d'une étoile est une tache de diffraction, mais le plus souvent, c'est une structure spatialement et temporellement bien plus complexe.
Le but de cette section est de comprendre et d'interpréter la structure spatiale d'une image simple.
L'astrophysique nous apprend que les étoiles sont des sphères gazeuses, tellement lointaines qu'il est impossible dans la plupart des cas de les résoudre spatialement. Pourquoi alors les représente-t-on et les voit-on avec diverses formes tellement différentes d'un point ou d'un cercle, mais le plus souvent proches du symbole ?
En fait, plusieurs phénomènes se conjuguent pour aboutir à ces formes et les expliquer :
L'image d'un objet ponctuel, non ponctuelle, est donnée par la fonction de transfert de la chaîne de détection. Cette fonction de transfert, dans ce cas précis, s'appelle fonction d'étalement du point, soit FEP en français ou PSF en anglais (point spread function).
Connaître ou estimer la fonction d'étalement du point est une étape indispensable pour le traitement d'image. Autre exemple : la FEP d'une image obtenue par le satellite CoRoT.
On rend compte d'une fonction d'étalement du point simple par sa largeur à mi-hauteur. Souvent, les images obtenues dans les longueurs d'onde millimétriques ou radio mentionnent explicitement l'extension à mi-hauteur de la tache image élémentaire.
La résolution spatiale dépend intimement de la FEP : distinguer les détails d'un champ s'avère impossible aux échelles plus petites que la largeur à mi-hauteur de la FEP.
La fonction de transfert, l'image d'un objet ponctuel, transcrit la qualité de la formation d'image.
La fonction de transfert de la chaîne de collecte du signal, ou fonction d'étalement du point, rend compte de l'image non ponctuelle d'un objet ponctuel. Cette fonction de transfert relate toutes les modifications apportées à l'image idéale.
Par définition, l'image d'une source ponctuelle est la fonction de transfert, au bruit près.
L'image d'une source non ponctuelle est son image géométrique idéale convoluée par la fonction de transfert. Au mieux, la fonction de transfert rend compte de la diffraction. Mais elle inclut aussi tous les autres défauts de la chaîne de détection.
Le lien entre la fonction de transfert et la résolution est immédiat : il n'est pas possible d'obtenir de détails plus fins que la fonction de transfert.
Il est souvent suffisant de rendre compte de la fonction de transfert, si elle présente la symétrie circulaire, par sa largeur à mi-hauteur.
Les pages suivantes décrivent la contribution de la diffraction à la fonction de transfert. Les aberrations optiques ne sont pas abordées. Le rôle de la turbulence atmosphérique est traité dans une section à part.
L'animation ci-dessous décompose, dans un cas unidimensionnel, la transformation d'un objet en son image via la FPE.
L'image d'un point n'est pas un point, mais une tache. Au mieux, la tache de diffraction, ou alors une tache élargie par la turbulence.
Le plus souvent, le miroir secondaire occulte le faisceau incident. Le front d'onde initial n'est pas seulement découpé par le miroir primaire, il est aussi amputé de sa partie centrale. La tache de diffraction d'un télescope possédant un miroir secondaire sur son axe optique est moins lumineuse mais plus étendue que celle du miroir primaire considéré seul. La perte de flux lumineux est due à l'occultation par le miroir secondaire d'une partie du faisceau.
L'araignée, le support du miroir secondaire, occulte également la pupille. Sa signature apparaît clairement pour une source brillante.
Sur une image, certains objets semblent soumis à la diffraction, avec de belles aigrettes de diffraction, alors que d'autres non. Les premiers sont des objets non résolus (typiquement une étoile), alors que les seconds sont étendus (typiquement une galaxie). Les contributions des différents points sources d'un objet étendu, non superposées, sont diluées et ne se distinguent pas.
Diffraction de Fraunhofer. Diffraction par une fente rectiligne.
Déterminer et dimensionner le rôle de la diffraction dans la formation d'image.
La demi-largeur angulaire de la tache centrale de diffraction obtenue à la longueur d'onde pour un collecteur de diamètre vaut :
Le facteur 1.22 est d'origine géométrique (dans le cas d'une fente rectiligne de largeur , le facteur est 1) ; c'est la première valeur qui annule la fonction de Bessel qui rend compte de la diffraction par une pupille circulaire.
Il est physiquement impossible de distinguer des détails plus petits que cette tache image : la diffraction fixe la résolution ultime d'un collecteur unique.
Pour comparer la tache de diffraction au diamètre angulaire des objets étudiés, il est utile de connaître l'ordre de grandeur :
et aussi
La relation entre la taille angulaire de la tache image et le diamètre du collecteur montre directement l'intérêt d'augmenter ce dernier : cela permet d'avoir des images angulairement mieux résolues.
L'appliquette ci-jointe montre la diffraction d'une vague de surface par une ouverture étroite.
Le support du miroir secondaire, appelé araignée, occulte le faisceau primaire, et rajoute sa signature à la figure de diffraction, surtout pour les objets brillants.
L'appliquette ci-dessous calcule la tache image de divers collecteurs. Visualiser l'influence, avec un seul collecteur (avec circulaire comme choix de pupille) :
Visualiser l'influence, avec un collecteur et une occultation du secondaire (avec circ+ obst. second. comme choix de pupille) :
Visualiser l'influence, avec plusieurs collecteurs (avec 2 circulaires ou bien croix d'Angel):
Difficulté : ☆ Temps : 10 min
L'appliquette ci-jointe montre l'étoile double Mizar, dont les 2 composantes sont séparées de 14.4", observées dans le rouge à 800 nm, par un télescope de la classe 1-m.
Déterminer l'échelle de l'image, en "/pixel.
Déterminer le rayon des anneaux concentriques entourant chaque étoile.
Ces anneaux peuvent-ils être dus à la diffraction par le miroir primaire, secondaire (ces anneaux se situent à ) ?
Difficulté : ☆ Temps : 20 min
Les figures ci-jointes montrent le miroir primaire et l'ancien foyer (utilisé jusqu'en 2000) du grand radiotélescope de Nançay (Observatoire de Paris).
L'antenne principale a une taille de . Estimer le profil de la tache angulaire de diffraction, pour les trois longueurs d'onde de travail 9, 18 et 21 cm (raie de couplage spin-orbite de l'hydrogène atomique).
[2 points]
Pourquoi y'a-t-il 3 cornets de détection ?
[1 points]
Discuter de la forme et de l'orientation de ces cornets.
[1 points]
Deux motifs se conjuguent pour privilégier les collecteurs de grand diamètre : la taille de la tache de diffraction et le flux collecté. Comme le montre la table ci-joint, le flux reçu par unité d'élément d'image résolvant varie comme la puissance quatrième du diamètre collecteur, lorsque la taille de la tache image est limitée par la diffraction et que le détecteur échantillonne cette tache image. Le gain obtenu provient d'une part de l'accroissement de la surface collectrice, d'autre part d'une meilleure finesse de la tache de diffraction.
diamètre collecteur | flux total | surface tache image | flux/pixel |
1 | 1 | 1 | 1 |
Il est utile de s'attacher à récupérer une forte densité de flux sur les pixels, comme le montre cet exemple de traitement par optique adaptative.
Les schémas ci-joints illustrent le critère de Rayleigh, qui définit la condition pour distinguer 2 objets de magnitude identique angulairement voisins.
Diffraction de Fraunhofer.
Montrer le lien entre la diffraction et la résolution ultime d'un système optique.
La résolution limite dépend de la taille de la pupille et de la longueur d'onde. L'amélioration de cette valeur limite motive la construction de collecteurs de diamètre le plus grand possible, surtout à grande longueur d'onde.
Le tableau ci-dessous présente diverses taches images, en les traduisant également en distance à laquelle une pomme (de diamètre de l'ordre de 10 cm) présente la taille angulaire correspondante.
Instrument | pomme | ||||
" d'arc | (distance en km) | ||||
oeil | 7 | mm | vis. | 18 | 1.1 |
petit télescope | 12 | cm | vis. | 1 | 20 |
ISO, spatial | 60 | cm | IR | 8 | 2.6 |
VLT, Chili | 8 | m | vis. | 0.015 | 1400 |
VLT, Chili | 8 | m | 20 μm | 0.6 | 33 |
antenne VLBI | 70 | m | 21 cm | 12' | 27 m |
réseau VLBI | km | 21 cm | 0.005 | 4000 |
Le critère de Rayleigh permet de préciser à quelle condition on peut distinguer 2 sources ponctuelles : il faut que le premier zéro de la figure de diffraction de l'une corresponde au maximum de l'autre.
Difficulté : ☆ Temps : 10 min
On cherche à résoudre différents objets, en lumière visible. Déterminer le diamètre minimal du collecteur nécessaire, la résolution angulaire étant limitée par la diffraction, dans les cas suivants.
Un cratère de 20 km sur la Lune (distante de 380 000 km).
Une étoile double, dont les composantes sont séparées de 0.2".
L'apparence d'un objet dépend intimement de la finesse des détails les plus fins. Ainsi, l'identité des anneaux de Saturne n'a été dévoilée que lorsque des observations de qualité suffisante ont permis de trancher parmi les multiples interprétations alors discutées.
Le gain en résolution angulaire permet une meilleure identification des images ; par exemple pour la Lune observée avec un petit collecteur, ou bien un grand collecteur corrigé des premiers ordres de la turbulence.
A grande longueur d'onde, la diffraction empêche une vision spatialement bien résolue, sauf à avoir un collecteur de très grande taille. Pour une antenne radio unique, circulaire de diamètre correspondant à un nombre limité de longueurs d'onde, le lobe d'antenne apparaît très étendu.
Il est important, pour enregistrer une image en respectant sa résolution angulaire, d'avoir des éléments d'image ou pixels convenablement dimensionnés.
La quête de résolution angulaire de plus en plus fine nécessite des bases de collecte d'observation de plus en plus étendues. Comme la taille d'un élément collecteur est limitée (en 2018 : à 8 m en mono-pupille pour les télescopes du VLT, Gemini Nord et Sud, Subaru ; 10 m en pupille segmentée pour les 2 télescopes Keck; bientôt 39 mètres pour l'ELT européen de l'ESO), on se tourne vers l'interférométrie.
La résolution angulaire ne dépend pas uniquement des conditions de collecte du signal, avec un collecteur de diamètre plus ou moins grand ; elle dépend aussi de la façon dont l'image est finalement enregistrée. L'enregistrement du signal, aujourd'hui quasi uniquement sous forme numérique, doit être adapté à la résolution.
Afin que la taille finie des pixels ne limite pas la résolution, le critère de Shannon énonce qu'il faut au moins 2 pixels par élément de résolution.
Par exemple, si la résolution visée est de 0.4", un pixel doit couvrir 0.2". S'il est plus gros, sa taille va limiter la résolution. S'il est plus petit, le signal sera suréchantillonné spatialement, sans gain d'information spatiale.
La résolution dépend de bien d'autres paramètres. On peut citer : la qualité de l'atmosphère, les aberrations géométriques...
L'aspect de galaxie M31 (d'Andromède) dépend de la résolution angulaire instrumentale. Plus elle est élevée, plus les détails observables sont fins.
La résolution est également limitée par la pixélisation, qui conditionne la FEP.
Difficulté : ☆ Temps : 20 min
Dans le cadre du développement d'un instrument, on cherche à choisir la caméra optimale, càd celle qui réalisera les performances demandées, pour un coût minimal. Un constructeur propose des caméras de taille 1k1k (1000 px par 1000 px), 1k2k, 2k2k, et 2k4k, avec pixels carrés de 20, 15 ou 9 micromètres de côté.
Le collecteur présente un diamètre de 3.6 m, pour une ouverture f/3.3 En déduire la focale équivalente, puis le lien entre la taille physique du pixel et le champ qu'il couvre.
Le champ doit couvrir , avec une résolution de . En déduire la caméra appropriée.
Difficulté : ☆☆ Temps : 15 min
L'identification de la nature des anneaux de Saturne ne fut pas sans peine. Le but de l'exercice est de déterminer la résolution angulaire nécessaire permettant de le faire.
A l'opposition, Saturne s'approche à 8.5 UA de la Terre. Le rayon planétaire vaut 60 000 km, les rayons interne et externe des principaux anneaux respectivement 90 000 et 140 000 km. On suppose que les anneaux sont observés sous grand incidence (l'incidence maximale est de l'ordre de 26 deg), pour être dans un cas favorable (lorsque la Terre passe dans le plan des anneaux... on ne les voit simplement pas). Néanmoins, pour simplifier les calculs, on s'intéresse au seul problème 1-D portant sur la seule variable radiale, selon la géométrie de la figure jointe.
Refaire à l'échelle schéma de Saturne et de ses anneaux. Déterminer le plus petit élément bien contrasté à observer pour pouvoir identifier les anneaux.
[1 points]
La résolution devant être au-moins d'un facteur 2 plus précis que la taille du plus petit élément à identifier, déterminer la résolution nécessaire.
[2 points]
pages_diffraction-image/diffraction-image-sexercer.html
pages_resolution-spatiale/resolution-spatiale-sexercer.html
pages_diffraction/diffraction-image-sexercer.html
Établir l'échelle en se repérant par rapport au système double.
Le seul repère donné est la séparation des 2 composantes. Une mesure seule est entachée d'erreur. Plusieurs mesures, avec l'outil ligne donnent en pixels : 60.4 ; 59.5 ; 59.8 ; 58.2 ; 59.5 ... soit de l'ordre de .
On en déduit l'échelle 0.24"/pix, ou 4.13 pix/".
Travailler avec l'outil cercle
Les mesures, avec l'outil cercle, donnent en pixels, pour l'anneau entourant la composante faible pour les anneaux entourant la composante brillante , soit respectivement 2.6, 4.1 et 7.3".
Calculer la tache de diffraction.
La tache de diffraction vaut .
Elle est bien inférieure aux anneaux mesurés. Ils ne peuvent pas être dus à la diffraction par le miroir primaire. Ils ne semblent pas être liés à la diffraction par le miroir secondaire (de diamètre caractéristique 10 cm dans ce cas, pour coïncider au premier anneau), car leurs rayons ne progressent pas de la bonne manière. De toutes façons, la diffraction ne peut pas expliquer le fort contraste du grand anneau entourant la composante brillante ; par conséquent, des réflexions parasites sont suspectées.
pages_diffraction/diffraction-resolution-sexercer.html
Estimer la taille angulaire du cratère, et la comparer à la résolution limitée par la seule diffraction :
La taille angulaire du cratère représente 20/380 000 rad, soit , soit environ 11".
Cette valeur est à comparer à ; soit le diamètre :
Le cheminement pour arriver au résultat est analogue à la question précédente. Il faut un collecteur de diamètre 60 cm.
pages_diffraction/resolution-spatiale-sexercer.html
Revoir la relation entre ouverture, focale et diamètre.
Si est la focale, alors
Une ouverture de pour un collecteur de 3.6 m représente une focale de .
Déterminer la taille angulaire d'un pixel.
Bien échantillonner la résolution nécessite un pixel couvrant 0.3" (la moitié de la résolution de 0.6").
Le champ de , ou , devient, traduit en pixel, .
Avec la focale résultante , la résolution de 0.3", cad , correspond à une dimension physique de .
D'où la caméra choisie : 1k 2k, avec des pixels de .