Signatures spectrales

Auteurs: M. Gerbaldi, B. Mosser, G. Theureau

Introduction

Un spectre stellaire porte la signature des éléments constituant la photosphère de l'étoile.

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Différents spectres stellaires.
Crédit : ASM

Signatures spectrales


Observer

Spectroscopie

La spectroscopie, ou l'art de regarder les photons selon leur couleur, fut introduite à la fin du XIXe siècle, profitant de l'essor de la photographie.

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Spectre de l'étoile \beta du Cocher, observé à l'Observatoire de Paris en 1892 (pose de 1h20 !). Remarquer la juxtaposition d'un spectre de référence en émission.
Crédit : Bibliothèque de l'Observatoire de Paris

Spectre du soleil à haute résolution

Le spectre du soleil observé à très haute résolution spectrale présente de très nombreuses raies d'absorption. On remarque entre autres que la densité de raies spectrales est plus élevée dans le bleu que dans le rouge ; des raies telluriques dues à l'absorption dans l'atmosphère terrestre, se superposent aux raies stellaires, mais restent minoritaires.

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Le spectre solaire à haute résolution spectrale.
Crédit : NOAO
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Le dioxygène tellurique présente une belle signature spectrale dans le rouge, caractéristique d'un spectre moléculaire de molécule diatomique symétrique, qui se superpose au spectre observé.
Crédit : ASM

Signatures spectrales et abondances

La modélisation d'un spectre nécessite la compréhension des conditions thermodynamique (température), mécanique (pression, en réponse au champ gravitationnel) et chimique (abondances) dans la photosphère stellaire, d'où sont issus les photons.

Toute la puissance de la spectrométrie réside dans cette finesse d'analyse, p.ex. pour aller dénicher à haute résolution spectrale de fines raies, et en sachant les interpréter.

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Spectre de Saturne dans l'infrarouge moyen, et interprétation proposée.
Crédit : ESA/ISO
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Découverte d'un motif spectral dû à l'uranium, à 385.957 nm, dans un spectre stellaire (étoile géante CS 31082-001) très peu métallique. L'ajustement du profil de raie permet de mesurer l'abondance relative d'uranium, comparée à celle de l'hydrogène atomique.
Crédit : UVES/VLT, Observatoire de Paris

Prospective

Un exemple illustre la puissance de l'information spectroscopique : une preuve de vie exoplanétaire serait apportée via l'étude spectrale IR, sensible à la présence d'ozone. L'ozone est liée à la présence d'oxygène, et donc à une chimie particulière qui est, au-moins dans un cas connu, propice à la vie.

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Une signature spectrale attendue : celle de l'ozone dans un spectre exoplanétaire, signant la présence de vie.
Crédit : ASM

Apprendre

objectifsObjectifs

Un cours complet de transfert de rayonnement, nécessaire pour comprendre les tenants et aboutissants du bon usage des données spectrométriques, est ici hors de propos, car trop complexe. Contentons-nous de récapituler quelques-uns des ingrédients qui permettent de comprendre un spectre.

Signatures

On en déduit que l'interprétation d'un spectre apporte des informations sur les grandeurs qui précèdent : température, gravité, abondance des éléments.

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Superposition des profils de raies : la largeur naturelle est très fine devant les élargissements possibles dus à la température (agitation thermique, élargissement Doppler) ou aux chocs (élargissement par pression). Cette dernière cause d'élargissement conduit à des ailes de raies très marquées.
Crédit : ASM

Largeur des raies

Dans l'atmosphère stellaire, deux phénomènes contribuent essentiellement à élargir les raies, conduisant à des largeurs bien supérieures à la largeur naturelle.

Si l'étoile est en rotation rapide, le profil de vitesse rotationnel est source d'un nouvel élargissement des raies, encore par effet Doppler .


S'évaluer

exerciceÉlargissement des raies spectrales

Difficulté : ☆☆☆   Temps : 20 min

Question 1)

Déterminer la durée moyenne \tau entre deux collisions, en fonction du libre parcours moyen \ell (la distance moyenne entre 2 collisions) et de la vitesse moyenne des atome \bar v.

[1 points]

Question 2)

Déterminer le libre parcours moyen \ell d'un atome en fonction de la section efficace de collision \sigma et de la densité particulaire n. En déduire que le libre parcours moyen varie comme l'inverse de la masse volumique dans l'atmosphère de l'étoile.

[3 points]

Question 3)

On suppose que l'élargissement de la raie par pression \Delta v _{\mathrm{p}} varie comme 1/\tau, inverse de la durée moyenne entre 2 collisions. En déduire la dépendance de \Delta v _{\mathrm{p}} en fonction de la température et de la masse volumique :

[2 points]

Question 4)

Montrer que, si l'élargissement des raies par pression est sensible, il permet, à type spectral donné, de distinguer les différentes classes stellaires.

[1 points]


L'hydrogène


Observer

L'hydrogène interstellaire

L'hydrogène neutre est omniprésent dans l'Univers. Dans le milieu interstellaire, sa signature apparaît à diverses fréquence (visible, submillimétriques, radio...). La signature radio correspond à l'inversion du spin de l'électron : sa fréquence au repos vaut 1420 MHz, pour une longueur d'onde de 21 cm.

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Le ciel vu par la raie à 21 cm de l'hydrogène atomique. La signature de la Voie Lactée domine.
Crédit : NRAO

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L'hydrogène stellaire

L'hydrogène est le constituant majoritaire des étoiles. La dépendance en température d'une raie de l'hydrogène apparaît clairement, pour des étoiles de type spectral chaud, beaucoup moins pour des températures d'équilibre plus basses. L'appliquette montre l'intervalle spectral correspondant à la raie H beta de l'hydrogène dans des étoiles de type A6 à K7 (température effective : 8000 à 4000 K). Le flux est normalisé à 1 dans le continu.

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Spectre du quasar GB1759+7539. La double échelle donne les longueurs d'onde observée ainsi qu'au repos. La raie Lyman alpha observée à 492.5 nm correspond à l'émission du quasar. La forêt Lyman alpha est visible entre 121.6 nm (longueur d'onde au repos) et 492.5 nm.
Crédit : Keck/HIRES

Raies en absorption

Des centaines de raies sont visibles dans le spectre d'un quasar éloigné, ce qui signe la présence sur la ligne de visée de matériel absorbant.

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Position et élargissement des raies alpha et beta de l'hydrogène et du deutérium dans la nébuleuse d'Orion. Leurs positions spectrales sont ramenées à une valeur de référence, leur position au repos, ce qui permet de les superposer ; leur décalage est directement compté en vitesse .
Crédit : CFHT

Hydrogène et deutérium

Les raies de Balmer du deutérium apparaissent au voisinage de celles de l'hydrogène. Le décalage entre les raies de H et D est dû à un effet isotopique : l'électron n'a pas la même masse réduite autour du noyau de H (1 proton) et celui de D (de masse double, avec 1 proton et 1 neutron). [Rappel : la masse réduite \mu est définie par \mu = m _{\mathrm{e}}m _{\mathrm{noy}}/(m _{\mathrm{e}}+m _{\mathrm{noy}}), et s'approxime par m _{\mathrm{e}}\ (1-m _{\mathrm{e}}/m _{\mathrm{noy}})].


Apprendre

L'hydrogène : omniprésent dans l'Univers

Comme l'hydrogène représente presque 9 atomes sur 10 dans l'Univers, sa signature spectrale est omniprésente en absorption, en émission, dans diverses gammes du domaine spectral (raies de Balmer, raie à 21 cm...).

L'hydrogène interstellaire

L'hydrogène du milieu interstellaire, sous forme moléculaire ou atomique froide, est à une température variant de 10 à 1000 K. L'hydrogène atomique neutre émet dans une fréquence radio particulière correspondant à la longueur d'onde 21 cm. L'intensité de la raie d'émission dépend de la densité totale d'hydrogène atomique neutre le long de la ligne de visée. La mesure de cette intensité de la raie observée permet donc de connaître la répartition bi-dimensionnelle des nuages d'hydrogène atomique.

Et l'hélium ?

Après l'hydrogène, l'hélium est le deuxième constituant le plus abondant dans l'Univers (environ 25%, par masse, soit 10% en concentration).

Mais la signature spectrale de l'hélium, gaz rare, est fort discrète. Comme l'hélium est difficilement ionisable, il faut une température élevée pour mettre en évidence les raies de l'hélium correspondant au spectre d'ionisation. En l'absence de moment dipolaire, l'atome He ne présente pas de spectre de vibration ni rotation.


Réponses aux exercices

pages_signatures-spectrales/signature-spectrale-sevaluer.html

Exercice 'Élargissement des raies spectrales'