Le milieu interstellaire
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- Introduction au Milieu Interstellaire

Réservoirs d'énergie : champ de rayonnement

Auteurs: Sylvie Cabrit, Cecilia Pinto
L'interface entre la région HII M17 et le nuage moléculaire adjacent
M17interface.png
Image infrarouge obtenue avec le télescope NTT de l'Observatoire Européen Austral. La région HII M17, dans la partie gauche de l'image, est ionisée par un amas d'étoiles chaudes. L'émission diffuse est associée au continuum du gas ionisé. Le nuage moléculaire adjacent, à droite de l'image, apparaît ici comme une masse sombre qui absorbe la lumière de la plupart des étoiles situées derrière. A l'interface entre les deux, le nuage moléculaire est photodissocié par le rayonnement FUV et s'evapore vers la gauche en formant une région de photodissociation très fragmentée.
Crédit : SOFI,NTT,ESO

Des photons de toutes énergies baignent le milieu interstellaire. Ils ont pour principale origine les étoiles, les grains, et le fond cosmologique. Ce champ de rayonnement est une forme d'énergie importante. Mais son intensité et sa distribution spectrale dépendent fortement de l'endroit où l'on se trouve : distance aux étoiles chaudes, et quantité de poussière sur la ligne de visée vers la source (mesurée par l'extinction AV en magnitudes).

Rayonnement stellaire (UV, VIS, IR)

Les étoiles créent un rayonnement interstellaire diffus dans la Galaxie. Le rayonnement ultraviolet (UV) est dominé par la contribution des étoiles massives, très chaudes (de type O-B), la lumière visible est associée à des étoiles de type A, tandis que les étoiles de type K-M fournissent une contribution infrarouge. Le champ ultraviolet interstellaire est celui qui a l'impact le plus important sur le MIS : Au dessus de 13.6 eV il possède l'énergie suffisante pour photoioniser l'hydrogène (voire l'Helium) et créer des régions de gaz ionisé (régions HII); cependant, du fait de la forte abondance de H et He, ce rayonnement est entièrement absorbé dans une région limitée(appelée Sphère de Stromgren) autour des étoiles massives, de taille inférieure à quelques pc. Par contre, le rayonnement UV non ionisant, d'énergie inférieure à 13.6 eV, est moins absorbé et peut pénétrer plus loin dans le milieu jusqu'à rejoindre les régions d'interface appellée régions de photodissociation (PDR) entre régions HII et nuage moléculaire parent. Là, il y photoexcite et photodissocie les molécules, photoionise les nombreux éléments lourds, et chauffe le milieu par effet photoélectrique sur les grains de poussière. L'intensité du champ de rayonnement ultraviolet dans le voisinage solaire à été estimée par Habing et vaut \nu u_{\nu}4x10-14 erg cm-3 à h\nu=12.4 eV. L'intégration du spectre UV de Habing de 6 à 13 eV donne une densité d'énergie u_{Hab}(6-13eV)5.29x10-14 erg cm-3. Pour décrire l'intensité du champ FUV incident sur une PDR on utilise souvent un facteur d'échelle G_0 qui est défini comme le rapport de la densité de rayonnement de 6 à 13 eV à celle de Habing : G_0 =u(6-13eV)/u_{Hab}(6-13eV). Des estimations récentes donnent pour le champ de rayonnement interstellaire moyen la valeur G_0=1.7. Dans des régions de photodissociation typiques comme la nébuleuse de la Tête de Cheval on trouve G_0=100, alors que des valeurs de G_0=104-105 sont atteintes au sein des régions de formation stellaire.

Conversions du système CGS au système SI
GrandeurUnité CGSDéfinitionSI
longueurcentimètre 1 cm=10-2 m
massegramme 1 g=10-3 kg
tempsseconde 1 seconde=1 s
forcedyne 1 dyn =1 g cm s-2=10-5 N
énergieerg 1 erg = 1 g cm2 s-2=10-7 J
pressionbarye 1 Ba = 1 dyn/cm2=10-1 Pa

Rayonnement de la poussière (IR)

Le champ de rayonnement infrarouge provient essentiellement des grains de poussière. Ils sont très efficaces à absorber les photons ultraviolets, qui les chauffent, et ils se refroidissent en rayonnant dans les régions du spectre de l'infrarouge et du submillimétrique; Les grains de poussière transforment donc une partie de l'énergie stellaire ultraviolette en énergie infrarouge et en énergie thermique des grains; le reste étant transformé en énergie thermique et cinétique du gaz (effet photo-électrique, évaporation). A l'équilibre thermique, les grains atteignent des températures typiques de 5-50 K dans le MIS; ils peuvent atteindre 100-1000 K à proximité immédiate des étoiles jeunes (disques et enveloppes circumstellaires). Le spectre d'émission est alors continu et déterminé par la température et la composition des grains mais il peut être décrit avec une bonne approximation comme un spectre de corps noir (voir le cours " Fenêtres sur l'Univers"). Cette émission thermique représente en moyenne les 2/3 de la puissance irradiée par la poussière dans le MIS. Le 3ème tiers de cette puissance est rayonné dans l'infrarouge moyen dans des bandes d'émission discrètes (3.3, 6.2, 7.7, 8.6, 11.2, 12.7 μm) qui sont attribués à des hydrocarbures aromatiques polycycliques (PAH = Polycyclic Aromatic Hydrocarbons). Il s'agit de macro-molécules constituées d'atomes de carbone et d'hydrogène, avec une structure planaire composée de cellules hexagonales benzéniques. Ces macro-molécules sont trop petites pour être à l'équilibre thermique et rayonnent de façon "impulsionnelle" suite à l'absorption de chaque photon UV.

Rayonnement cosmologique

Le rayonnement cosmologique est essentiellement isotrope et présente un spectre de corps noir à la température de 2.7 K. Ce rayonnement millimétrique et submillimétrique apporte un chauffage et une source d'excitation minimum au MIS, important en particulier pour la population des niveaux rotationnels de basse énergie des molécules.

La figure ci-dessous montre un exemple des différentes contributions au champ de rayonnement, tel que prédit au voisinage d'une étoile B sans atténuation sur la ligne de visée.

spectreISM.png
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