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GW150914, la première détection |
La première détection d’ondes gravitationnelles a été réalisée aux Etats Unis, par la collaboration LIGO, le 14 septembre 2015, même si la découverte n’a été annoncée que le 11 février 2016, après de nombreuses vérifications. Les miroirs de l'interféromètre de Livingston sont entrés en vibration, puis, 7 millisecondes plus tard, le même phénomène s’est produit dans les miroirs de l’interféromètre de Hanford. La fréquence des oscillations a augmenté et leur amplitude a cru pendant 0,2 seconde, puis elles se sont amorties. Les figures ci-dessus montrent la fréquence du signal mesurée à Livingston et Hanford en fonction du temps.
Ce signal a été appelé GW150914. GW est un acronyme pour Gravitational Waves. Les chiffres qui suivent donnent l’année, le mois et le jour de l’événement. L’amplitude de la perturbation était trop faible pour qu’un être humain puisse s’apercevoir de quoi que ce soit, mais on a remarqué que la fréquence du signal correspondait à des longueurs d’onde audibles. En l’amplifiant énormément, on entend ce qui pourrait ressembler au pépiement d’un oiseau.
Au maximum de l’intensité, la variation de distance entre l’unité centrale et les miroirs au fond des bras a été de un sur 1021 (graphiques sur la première ligne de la figure ci-dessus). La similarité des formes d’onde observées à Livingston et à Hanford (respectivement, la courbe bleue et la courbe rouge dans la figure en haut à droite), ainsi bien que la presque simultanéité des deux détections, cohérente avec une perturbation qui voyage à la vitesse de la lumière (la distance entre Hanford et Livingstone est d’environ 2000 km) supporte fortement l’interprétation que le signal mesuré soit dû au passage d’une onde gravitationnelle. Des ondes sismiques ne pourraient pas se propager à une vitesse supérieure à la vitesse du son dans les roches (de l’ordre de 10 km/s).
Un autre argument qui supporte cette interprétation est la similarité entre la forme d’onde observée et le signal prédit par les simulations numériques des ondes gravitationnelles générées par la coalescence de trous noirs. Les deux graphiques sur la deuxième ligne de la figure ci-dessus comparent ces prédictions (les courbes rouge et bleue dans les graphiques du milieu) à l’évolution de l’amplitude des oscillations, après que celles-ci ont été nettoyées du bruit (les courbes grises au-dessous des courbes rouges et bleues montrent le signal nettoyé). Cette comparaison a non seulement confirmé l’origine gravitationnelle du signal mesuré mais elle a aussi permis de reconstruire certains aspects de l’événement astrophysique qui l’a produit.
Les ondes gravitationnelles viendraient d’un système binaire de trous noirs de 35 et 30 masses solaires. Leur émission correspond aux dernières orbites des deux trous noirs et à leur coalescence finale, qui aboutit à la formation d’un seul trou noir de 62 masses solaires, la masse-énergie des 3 masses solaires manquantes ayant été convertie en ondes gravitationnelles. La puissance émise durant les dernières 20 millisecondes de la coalescence aurait été de 3 x 1056 erg/s, soit 50 fois la puissance lumineuse totale de toutes les étoiles dans l’Univers visible.
Le signal provenait de la direction de la constellation du Sagittaire. A partir de l’amplitude du signal (ou bien de la faiblesse du signal, pour phénomène d'une telle puissance), on a estimé que l’événement s’est passé à une distance de 440 mégaparsecs, donc bien au-delà de l’Univers local. Les ondes gravitationnelles que nous avons détectées le 14 septembre 2015 ont donc voyagé dans l’espace pendant 1,4 milliards d’années avant de nous parvenir.
Cette détection d'ondes gravitationnelles ouvre de nouvelles fenêtres sur l’Univers. Les premiers éléments enthousiasmants sont la détection expérimentale d’un phénomène physique prédit mais non observé, et qu'il s'agit d'une nouvelle confirmation de la théorie de la relativité d’Einstein. L’intérêt des détections suivantes (GW151226, GW170104) et des prochaines porteront plus sur les connaissances astrophysiques qu’elles apportent sur les propriétés des trous noirs et la fréquence de ce type d’événements. Le télescope restera toujours l’instrument principal de l’astronome, mais la détection d’ondes gravitationnelles aussi bien que celle des neutrinos nous offre la possibilité d’étudier les astres par d’autres manières que l’observation de leur lumière.
Les limites les plus importantes au développement de l’astronomie des ondes gravitationnelles restent la taille maximale des interféromètres que l’on peut construire et les bruits dérivant de nombreux phénomènes qui se passent sur notre planète. La prochaine étape sera donc le développement d’un interféromètre dans l’espace. L’Agence Spatiale Européenne a déjà un projet dans ce sens. Il s’agit de LISA (Laser Interferometer Space Antenna). Dans LISA, l’unité centrale et les miroirs au fond des bras seront remplacés par trois astronefs séparées par des distances de millions de kilomètres. La mission LISA devrait devenir opérationnelle après 2030. Une étude préliminaire des bruits auxquels on peut s’attendre dans les mesures avec LISA vient d’être plubiée en 2017.